Contredanse en quête du Graal (épisode 3)

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Le grand soir est passé, le Graal arthurien est retrouvé, les lumières sont éteintes. Souvenirs encore proches d'un participant actif assez inattendu dans une représentation «celtique», notre chroniqueur Amato, le «celto-sceptique» nuancé. L'occasion amicale, conviviale et spectaculaire en a fait le larron et il a dansé en public pour le légendaire roi Arthur. Oui, ma chère.

Après une «couturière»*, puis une « générale » de bon aloi, arriva enfin le grand soir de la première.
C'est un spectacle en 40 tableaux chorégraphiés pour une école de danse non classique, des tout petits aux adultes, illustrant une odyssée romanesque et très libre sur la quête du Graal par Arthur et ses chevaliers. Danses orientales, méditerranéennes, israéliennes, irlandaises, bretonnes, africaines, flamenco, modern jazz, disco, hip hop ... l'éventail est large. Des danseurs-comédiens assurent le récit en transitions reliant des séquences de danse, avec des scènes de combats, de table ronde, de voyage. Tous les parents, papys, tontons, voisines, amis, copines et autres amateurs de danse venus de tout le canton sont là, et occupent quatre fois 500 places à guichets fermés. De plus, la magie du spectacle, des projos, des feux de la rampe, des effets vidéo, d'un son professionnel, sont brillamment réunis. Les chassés-croisés des changements de costumes et d'accessoires dans les coulisses vont bon train, sans trop de fébrilité, c'est même très joyeux.

Au 23ème tableau, peu après l'entracte, c'est celui où la cour danse pour le Roi Arthur. Ah, tout arrive !
Côté jardin, je m'assure que ma partenaire, qui est aussi à la billetterie, à la supervision du bar, ainsi que dans plusieurs scènes du spectacle, est bien à proximité au moment clé. Que ferais-je solitaire pour le moulin, le side, la pastourelle, la gypsy, le longway, le cast alias jet d'eau et enfin le cortège des couples ? Un passage de chaque figure, car il n'y a quasiment aucune redite dans cette choré, il ne faut donc pas se louper, ni partir ou arriver du mauvais pied ou par la mauvaise épaule, cela ne pardonnerait pas. Les swings sont très calibrés et contingentés, un de trop, t'es mort (de honte), en tout cas en retard pour la figure suivante. Chaque geste et enchaînement scrupuleusement travaillés, je les ai révisés mentalement avant le sommeil propice à la mémorisation. Petite anxiété, donc, mais de l'impatience plus que du bon gros trac de professionnel, avant le signal d'entrée en scène sur l'intro musicale*, dans le noir qui précède des éclairages léchés. Mais si je trébuchais, ou si j'avais un trou de mémoire au pire moment ? Hantise du passage en vidéo-gag ou sur le net.

Après chacune des représentations, des correctifs et retouches de positionnements, de vitesse, de distances, sont encore apportés par le groupe et par la chorégraphe. L'ensemble paraît globalement bien tourner, mais le juge de paix de ces soirées sera l'impitoyable enregistrement du futur DVD, à visionner sans complaisance, à tête et tripes reposées. Les costumes et le mouvement n'y dissimuleront pas les petits bugs, accrocs, temps d'avance ou de retard peu perceptibles par une salle conquise, comble et comblée, semblait-il.

Dragons, épée, contredanse

Le final est grandiose, je me sens, quoiqu'ultime figurant du dernier rang, sur un pont céleste entre Brocéliande et Broadway. Etonnant et plutôt bienvenu : lors du générique de fin et avant le grand final, le narrateur off tient un épilogue décalé et iconoclaste à la «Monty Python» sur les aspects dérisoires ou illusoires des contes et fantaisies liées au Graal, saint calice ici désacralisé, matérialisé par une infâme coupe de tournoi sportif en fer blanc chromé, embellie et magnifiée par une « douche » lumineuse habilement issue du firmament théâtral, pointant les raccourcis fantastiques du mythe et les réalités quotidiennes à retrouver au sortir d'un spectacle bien enlevé.

Prochain weekend, trois bals folks au programme. Autres styles, autre codes, autres moyens, autres priorités, autres plaisirs, mais non sans liens partagés. Tant qu'il y aura des musiques et des danses ... y compris bretonnes, anglaises, irlandaises, écossaises, galloises, la fête sera aussi belle !

Amato

(A suivre...)

• *couturière ou colonelle, c'est la répétition pour les dernières retouches de costumes et de raccords scéniques, avant la générale

• *en lien : la vidéo de la représentation