Danse au mariage du Roi Arthur
Amato explore dans le concret les différences entre le bal et le spectacle.
Je vais participer peu avant l'été à une danse sur scène dite « pour le mariage du Roi Arthur » dans un spectacle amateur des associations culturelles d'une bourgade des environs. Le thème en est la légende de la Table Ronde et de ses chevaliers. C'est dans un vignoble de l'est, un village dont par ailleurs l'eau minérale des sources est classée et distribuée dans les rayons « produits haut de gamme ».
Pièce rapportée, j'avais répondu à un courriel de recherche de « messieurs, danseurs des bals folks » pour compléter des couples dans une scène de 2'58''. Le spectacle durera 2h, mais je suis d'emblée certain que notre danse en sera le clou. Elle est une création concoctée par la metteuse en scène-chorégraphe de l'opération. Voici quelques infos autour de cette contredanse. Discret reportage en situation. Chuuuuut ... Taupe secrète.
La première de trois répétitions
La troupe est composée de treize femmes d'un atelier « folk », de huit de leurs conjoints ou compagnons quasi non-danseurs à ce jour. Ces derniers ont accepté (après d'âpres négociations sur l'oreiller, dit-on ...) de danser en costume et de tout apprendre pour assumer l'événement, soit quatre représentations prévues en salle de spectacle «pro». Quatre éléments masculins complémentaires dont moi, secourable et motivé à l'envi, ont donc répondu « oui » au courriel de recherche. Il y a aussi avec nous un danseur très expérimenté d'un groupe ATP (Arts et Traditions Populaires, alias « folklore ») dans les premiers rôles.
La choré-patchwork mélange des séquences et figures de Galopede (- mignonnement rebaptisée ici, par une oreille créative, « la Galopine »), de la Chapelloise suédoise, some Sicilian circle anglo-saxon, un extrait de Branle du rat (frenchy), dans des enchaînements sans répit de branle double avec balancé, de moulin, de gypsy (qu'on dénomme ici « eye to eye », bon, pourquoi pas ?), de dos à dos épaule droite, de pastourelle. Pas mal et ambitieux. Des quadrettes de partenaires stables sont d'abord esquissées puis stabilisées, de niveaux disparates au début. Elles s'affineront rapidement.
La musique MP3 dite de «folk new age», récupérée sur l'internet, est une jig faussement calme jouée surtout aux violons stratosphériques, mais aussi en chorus de basses angéliques de chœurs célestes avec de gros coups de timbales, le tout dans une résonance de cathédrale gothique. Du médiéval décalé qui ratisse large côté chronologie, proche du jeu vidéo et des hobbits, mais ça ira parfaitement, c'est du spectacle, toutes les licences poétiques et fantaisies sont permises.
Gloussements et sueurs froides se manifestent chez les hommes débutants, au moment où ils vont devoir apprendre à faire un « branle double » : c'est une réaction habituelle d'ajustement culturel des « profanes » à l'irruption de ce nouveau lexique de mots anciens aux sens évolutifs. Automobilistes, ils vont s'esclaffer encore aux seuls mots de «contredanse », et gourmands, vanner sur « crème/chaîne anglaise » (on échappa toutefois à la « gêne des dames »). Mais l'apprentissage s'avère sérieux, les suites dynamiques de mouvements, ne laissant que peu d'interstices de repos pour la gaudriole, se mettent en place cahin-caha.
Y'a encore du boulot, les lignes doivent être resserrées dans des diagonales de oufs, et les carrés de couples doivent mieux s'inscrire dans un cercle virtuel ... Ne pas regarder ses pieds, mais ses partenaires et les danseurs concernés. Compter et anticiper les mesures, malgré les molles douceurs de la musique éthérée. Où est mon épaule droite ? Ma main gauche ?? Ma contre-partenaire ??? Mais repos, c'est l'heure de clore pour ce début.
« La prochaine fois, dans un mois, nous parlerons aussi de costumes et postures » annonce et conclut la chorégraphe. Cela promet.
Amato
(A suivre ...)