Bals à la loupe
Fugaces, fusibles, futiles, fongibles, banales, sans suite mais vécues, les petites réflexions sans paroles de l'habitué des bals peuvent être retranscrites. Cela donne à peu près cela, en clair.
• Tiens, ce danseur ne vient plus accompagné au bal. Que devient sa jeune et belle absente ? Passée à la zumba ?
• Tiens, cette danseuse euphorique vient applaudir avec enthousiasme les musiciens, en bord de scène. Ils le méritaient bien. Gratifiante.
• Tiens, ce danseur vient trois fois l'an au bal, dont une fois accompagné. En fait il a déménagé à 300 lieues d'ici, vers les mers, au pays du fest-noz, et sa compagne bretonne fait le déplacement en visite à l'occasion. Fidèles.
• Tiens, il n'y a eu aucune pause dans ce bal. Quelle endurance, ces danseurs, quelle santé, ces musiciens ! Energie, osmose, vie en rose.
• Tiens, aucune des quadrettes en place n'a su danser correctement la «Carrée de La Châtre» : de drôles de mixtures arverno-berrichonnes se sont organisées, métissages fonctionnels et involontaires, sans AOC. Que donneront plus tard les «Grandes Poteries» programmées? Quant à la «Valsée d'Issoudun»... Confirmés étourdis et débutants motivés.
• Tiens, un bal gratuit, totalement subventionné et pas sauvage du tout. En plus c'est un bal à thème morvandiau-auvergnat. Deux couples (sur 70 danseurs) savent (ou assument de) danser la mazurka dans le style présumé de ces terroirs et régions, sans déhanchés lascifs mais avec des frappés dynamiques à l'ancienne. Autres temps.
• Tiens, un autre bal gratuit, ah, mais il y a un tronc pour des dons de bienfaisance. Les musiciens y ont joué une mazurka suisse (romanche), collective, en cercle. Et les danseurs savent s'y retrouver ou s'adaptent. Elégamment.
• Tiens, voilà le morceau de bravoure du groupe, une danse anglaise mixée en quatre figures, avec trois airs anglo-irlando-écossais qui s'enchaînent. Pas mal, à peine un tout petit chaos de mise en route après révision des figures. Le tout aurait été bon à mettre en ligne sur «You Tube» et «Dancilla». Bref, «nominable».
• Tiens, j'ai un mal fou à reconnaître -et encore plus à retenir- les morceaux de composition récente, très complexes, très tourmentés, moins mélodiques, très sophistiqués et assez indomptables. Dansables, soit, mais ils sont un défi de «trans-mission im-pos-si-ble» pour leur reproduction par l'apprentissage «à l'oreille». Pas français, l'impossible ?
• Tiens, tiens, tiens, une revenante, pas revue depuis bien quelques lustres. Je la reconnais au toucher durant la danse... à ses mains rêches et crevassées de travailleuse de chantier (lavandière à battoir ? repiqueuse de riz ? tailleuse de pierres...?). Son allure est devenue celle d'une alerte grand-mère. Aurait-elle encore entretemps «refait la route» et bouclé de longs tours du monde en «zéro empreinte CO2», avant ce retour aux sources ? Ni lambada, ni zumba, la revoilà.
Amato (à suivre...)
Mazurka frappée