Eprouvantes gesticulations, ardentes suggestions
Les musiciens et leurs bals sont forcément l’objet de critiques, même par leurs habitués les plus fervents. Mais s'il y a parfois à redire, de la pondération est souhaitable. Les groupes et animateurs sont surtout amateurs, comme les danseurs aussi. Leur rareté, leur sincérité et leur engagement enthousiastes méritent tous les encouragements à persévérer et à se bonifier, au-delà des reproches immédiats. Mais…
Tempo musical forcené, j’implose car comme trop souvent, le public y applaudit avec un zèle d’otaries dressées. La possibilité de bien danser a été oubliée. Jouer si vite, c’est jouer mal et jogger en rond n'est pas danser. Vitesse et précipitation.
Sono chaotique, rien à comprendre des annonces et explications. Comment savoir si le beau parleur a vraiment dit quelque chose de pertinent ? Communication ?
Plusieurs danses de couple enchaînées sans intervalles me ligotent à la même cavalière. Poli, je subis. Le bal folk, c’est savoir mine de rien mixer souvent les couples en alternant les formes de danses. Avec compréhension.
Mise en place des danseurs pour une énième et improbable « création authentique dépoussiérant le répertoire ancien ». Avec clonage d'influences latino-scandinaves sur des airs tzigano-berrichons. Excès de sophistication...
…surtout quand on m'encourage pour réaliser des tas de figures de base et moult variantes optionnelles, avec un « puisqu’il y avait un stage l'après-midi et que ses participants sauront entraîner les autres il n'y a qu'à faire comme eux etc." Exécution !
Ils font du "concert en bal", ô malheur : le pied du danseur n'est pas celui du mélomane (de même pour l'oreille !) Etre à l'écoute du public ? Ou jouer pour son nombril d’esthète ? Confusion.
Regrets éternels pour nombre de danses d’animation amusantes aux airs simples et sans chichis. Trop délaissé aux oubliettes LE répertoire, pour des empilages de "compos" et autres éphémères exercices de style. Déception car…
…plus il y a de nouveaux morceaux pour des danses généralistes, moins subsistent en bal de danses à caractère particulier (où un air = une danse précise et unique)*. Extinction.
*malgré quelques remarquables créations de belles danses, il est vrai.
Pénibles, ces gags de scène qui me font rire jaune. Entrer dans nos danses à coups de rigolade, c'est un contresens. Le plaisir en bal folk se vit plus en émotion intériorisée qu’en exubérance. La joie n’exige pas l’hilarité. De plus, bien des danses sont drôles et gaies par elles même. Sourions.
Sous des néons glauques de salles communales ou paroissiales maussades et de chapiteaux trop rustiques, nous sommes rendus blafards et présentons des mines souffreteuses de gothiques exhumés. Bal des vampires et des zombies. Funestes visions.
Certaines mises en scène de groupes déguisés notamment en bands de lutins/korrigans/hobbits celtiques d'opérette me consternent. A quand des nains de jardin pour musique alémanique ? Ou des trappeurs en fourrures pour musique canadienne ? Dérision.
Il serait judicieux que les musiciens avec prévenance indiquassent (imparfait de l'injonctif, ou du subjectif, comme disaient nos grammères) les trois prochaines danses, pour laisser prévoir les invites adéquates. Sinon, suspense sauvage, spéculations.
L’animateur nous enjoint d’embrasser notre cavalière, (pourquoi ne pas dire, en version égalitaire actualisée, de nous "embrasser entre partenaires" ?). Un élan spontané de ma cavalière en ce sens, ce serait magnifique. Mais la pression mise par cette hésitante coutume, c’est souvent comme au nouvel an : de l’appréhension.
En applaudissant trop complaisamment la dernière d'un groupe peu inspiré, il y a risque de rappel aussi intempestif qu'interminable au détriment du prochain groupe. Je mime prudemment mes bravos, soulagé de pouvoir penser enfin «ouf ». Et vive le bal ! Ponctuation.
(A suivre...)
Amato