Danser en fest-noz, conseils aux débutants
Dès que l'on est séduit par les fest-noz, immanquablement l'on ressent le besoin de rentrer dans la ronde, d'apprendre ces danses. Comment et quelles sont les différentes solutions pour y parvenir, c'est ce je vais tenter de vous apporter dans les pages qui suivent.
Conseils aux débutants
Surtout, ne foncez pas, les danses vous semblent simples, certaines le sont, pas toutes ! Observez, renseignez-vous, prenez votre temps. Évitez de rentrer dans la danse en vous disant, j'apprendrai sur le tas ! Vous risqueriez à la fois des déconvenues et, comme le font certains enhardis par une alcoolémie évidente, de rompre un fragile équilibre entre les danseurs, cette symbiose qui est à l'origine de la fascination qui vous pousse à vouloir rentrer dans la chaîne. On ne vous le reprochera pas, on vous encouragera même à apprendre, mais n'en abusez pas. Ces rondes et ces chaînes ne donnent leur pleine mesure qu'aux moments où tous sont à l'unisson, cela crée des instants magiques que les danseurs recherchent, espèrent, alors évitez de les gâcher inutilement.
Les premières fois, choisissez des danses simples, tel l'Hanter Dro, essayez d'abord de ne pas gêner vos partenaires, restez attentif. Quand il y a des mouvements de bras, laissez-vous guider, vous acquérez automatiquement ces enchaînements bien mieux qu'en tentant de les répéter par vous-même. Si vous avez été initié, évitez d'imposer votre manière de bouger les bras, gardez les souples ; le mieux pour les débutants, même initiés, est de suivre les mouvements de ses partenaires, de les accompagner. Même lorsque l'on sait danser, on s'efforcera toujours de se fondre dans l'ensemble des danseurs ; en danse bretonne, l'on ne danse pas les uns contre les autres, mais tous ensemble, donc adaptez-vous et cherchez à vous intégrer, pas à vous imposer.
Ensuite viennent les mouvements du corps produits par le jeu des pieds. Là encore, repérez le mouvement général, et occupez-vous de vos pieds ensuite. Une fois dans la chaîne, vous êtes embarqué, vous n'avez plus le temps de bricoler. Faites donc plutôt comme ces danseurs qui répètent les pas derrière la chaîne, avant de se lancer quand il leur semble avoir compris les pas.
Aspect qui déroute tout débutant, les danses en plusieurs parties, a priori les suites. Vous vous embarquez dans une ronde que vous avez comprise, tout va bien et subitement, voici un bal ou une autre forme de danse qui enchaîne sans prévenir ; l'on se sent un peu bête, piégé, mais ce n'est pas grave, les danseurs ont l'habitude et vous guideront. Il ne faut pas que cela vous empêche de participer, ce serait trop bête.
L'un des conseils les plus pertinents que l'on puisse vous donner si vous faites partie d'un groupe de débutants, c'est de vous séparer afin que chacun se retrouve entre des danseurs aguerris, c'est de cette manière que vous apprendrez ; sinon, quand plusieurs néophytes se retrouvent ensemble, certes ils s'amusent, mais ils ont tendance à se conforter mutuellement dans leurs erreurs, ils se rassurent, alors qu'ils seront perdus une fois seuls.
Quelques règles de courtoisie
Avant de poursuivre, voyons quelques attitudes auxquelles il est préférable de se conformer par respect pour les autres ; le terme de courtoisie peut vous paraître suranné, pourtant il s'adapte parfaitement au milieu du fest-noz, c'est même un élément constitutif de son charme.
Pour rentrer dans la ronde, il ne faut pas forcer, on demande gentiment par un petit signe, un mot. L'on ne rentre pas n'importe où, on ne se place pas devant le meneur d'une chaîne, c'est un quasi-impératif, l'on évite de se placer en fin de chaîne au cours de la danse, bien que ce soit largement toléré ; l'on rentre de préférence « dans » la chaîne. Les conventions veulent que dans un couple, l'homme se place à gauche et la femme à sa droite, c'est pour cela qu'un couple ou une femme seule entrant dans une chaîne ne doivent pas se placer à la droite d'un homme, on ne casse pas les couples. Vous me direz pourquoi pas à la gauche d'une femme ? Parce qu'en général les femmes sont plus nombreuses et acceptent de danser côte à côte, ce que font très rarement les hommes, quand ils le font, c'est qu'ils se connaissent ; les hommes ont généralement le choix et ils se placent alors entre deux femmes.
Dans la tradition traditionnelle, j'insiste sciemment, seuls les hommes peuvent mener ou même clore une chaîne, mais vous rencontrerez de courantes exceptions à cette règle et vous arriverez rapidement à la conclusion qu'il est préférable de suivre une bonne danseuse plutôt qu'un mauvais meneur...
Dans une chaîne, il faut prendre garde aux autres danseurs, ceux qui se trouvent derrière vous ou à côté, en Bretagne plus qu'ailleurs l'on est respectueux les uns des autres ; par exemple, si un obstacle se présente à vous quand vous progressez, pensez aux personnes qui vous suivent, prévenez-les ou déplacez légèrement la chaîne.
Certaines danses comportent un bal qui s'exécute en couple : théoriquement, l'homme de gauche et la femme de droite dansent ensemble, même s'ils ne se connaissent pas. Rien n'interdit pourtant, en cas de non-parité, de former des « couples » de trois personnes afin qu'aucun ne reste sur le côté, cela ne se fait pas toujours et il est dommage de voir des danseurs quitter momentanément la danse faute de partenaire.
Les danses en couple ne sont pas du tout connotées comme elles le sont dans les bals classiques ; les couples se forment sans formalité pour une danse et, à la fin de celle-ci, l'on se remercie entre partenaires et l'on se sépare, c'est tout ! Il est donc courant que des solitaires aient un bon nombre de partenaires de danse durant la même soirée.
Ici, la musique est produite par des êtres de chair et d'os, présents dans la salle et qui y mettent beaucoup d'entrain. La première des politesses est de ne pas les laisser jouer sans que personne ne danse. Les musiciens ont autant besoin de nous que nous avons besoin d'eux ; sauf s'il arrive que l'on ne sache pas identifier la danse, donc personne n'ose danser... Ensuite, quand ils ont terminé de jouer une danse ou la partie d'une suite, on les applaudit, cela semble logique, nous ne sommes pas au concert et en dansant, on finirait bien par les oublier... Attitude qui vous surprendra peut-être, il est courant que les musiciens remercient les danseurs si ceux-ci étaient peu nombreux ou s'il y a eu osmose entre eux et les musiciens, un autre monde vous disais-je.
Jean-Luc Kokel