Belle salle, bon parquet, bal parfait ?

Ode au parquet de bal

De nombreux éléments participent à l’étonnante magie des bals folks. Leurs danses d’origine traditionnelle de tous styles y réunissent activement des participants ouverts aux contacts et friands de variations et de mélanges de genres. Ces ouvertures culturelles et personnelles stimulantes en sont la quintessence. Mais d’autres ingrédients apprêtés de manières différentes selon les événements contribuent finement à la réussite de la fête.

Des facteurs artistiques et humains

Divers facteurs se recoupent et interagissent dans la réussite d’un bal. Parmi eux, la personnalité et l’énergie des musiciens, la manière dont ils communiquent avec les danseurs, ainsi que leurs choix de danse, bref leurs savoir-faire essentiels. Du côté des danseurs, il y a la complicité qui unit souvent les habitués et la satisfaction des nouveaux venus à découvrir la convivialité active si propre au folk. Il y a la connivence qui se noue entre musiciens et danseurs. N’insistons pas sur ces aspects-là pour cette fois.

Salle de bal pas à deux balles

Un autre élément, plus matériel, peut considérablement influencer l’ambiance du bal : le lieu où il se déroule. Entre gymnases (trop) polyvalents, salles des fêtes de tous âges et festivals en plein air, on en voit des vertes et des très mûres. Même si la musique et la danse peuvent en faire oublier le cadre, il ne faut pas le négliger.
Une salle spacieuse, haute en plafond, aérée, est une bonne base de départ. Décoration discrète, ou site de grand style, de la grange rustique au salon sophistiqué art déco ou au loft en devenir high tech, tout peut convenir côté accessoires. Le décalage des genres a son charme. Mais, abordons plus en détail certains nécessaires composants.

  • L’espace réservé à la danse doit être bien en vue et adapté au nombre de danseurs accueillis. Une salle trop vaste, dans laquelle les danseurs sont clairsemés donne bien sûr une impression frustrante de vide. Alors qu’une petite ou moyenne salle favorisent la rencontre et l’échange et que des danseurs proches de la scène renforcent le rapport dynamique et affectif (si, si !) avec les musiciens.
  • La buvette, importante, la buvette (ou le bar, selon). Positionnée à part, sans être éloignée. A l'écart, mais un petit écart, pour y rester lié à l’ambiance et pouvoir suivre les danses annoncées puis retourner danser quand la musique y appelle. Pas trop près non plus, car les buveurs ne doivent pas gêner les danseurs.
  • L’équilibre entre l’espace de danse et celui réservé aux non-danseurs est particulièrement stratégique. Pour les passionnés, surtout éviter le bal où dans le même lieu des convives sont attablés pour la durée. Le brouhaha des conversations et les cliquetis de la vaisselle sont une nuisance réelle quand on veut apprécier la musique et ses subtilités. Les bals réguliers organisés par des associations folks limitent cette difficulté car ils privilégient l’activité prioritaire qu’est la danse. Ils sont fréquentés par bon nombre de danseurs exigeants peu fatigables et de consommation frugale. A l’inverse, les organisateurs qui font une "opération séduction" pour attirer une foule diverse ont intérêt à prévoir davantage de tables pour fixer les simples curieux de passage.
  • Lumières et regards La lumière doit être adaptée au lieu et à ce qui s’y passe. Pas d’éclairage blanc brutal d’hôpital ou de supermarché, ni de pénombre ou de "light show" de boîte de nuit. En bal, même si l'on recherche une atmosphère intimiste, il est agréable et souhaité de percevoir les sourires et de pouvoir regarder le visage de la personne qu’on invite. Les musiciens, eux aussi, apprécient de distinguer les danseurs jusqu’au bout de la salle. Une lumière moyenne, à peine tamisée est donc plus conseillée.
  • Un "plus" ponctuel côté scène, quand des musiciens personnalisent leur lieu par quelques accessoires : couleurs, peintures, affiches, par exemple. Mais les drapeaux sont controversés ainsi que parfois des tenues de scène trop lourdement étudiées.

Ode au bon parquet

L’élément primordial du bal en est le sol. Il y a de tout dans ce domaine aussi. Le carrelage froid, même s’il rafraîchit les pieds nus de certains ascètes (im-)pénitents évoque fâcheusement les cuisines industrielles. Certains revêtements rugueux de salles de sport ne permettent pas de virevolter dans de bonnes conditions, sans parler du pénible gravier ou du macadam de certains festivals certes plus musicaux que dansants.
Le meilleur des sols pour le meilleur des bals, à la quasi unanimité des spécialistes, c’est le parquet ! Un parquet poncé et poli par des milliers de pieds et assoupli dans ses fibres les plus intimes. Un parquet qui fait corps avec les danseurs tant il semble réagir au rythme de la musique et accompagner le mouvement. Un parquet qui vit et chante avec le bal et qui trouve avec lui sa plus grande raison d’être. Un bon parquet, c’est un parquet de bois verni, sans écharde, ni clou qui dépasse. Un parquet qui glisse bien, ma non troppo ! Un parquet aérien qui rend la valse fluide mais qui campe bien vos appuis pour la bourrée. Ah, et aussi un parquet qui claque et sonne sec ! Avec un joli son percutant quand les pieds chaussés de talons adéquats y placent avec justesse les bons accents. Olé ! Il y a surtout un juste milieu à trouver (mais par qui ?!). Spécial matheux-physiciens : c’est un peu rechercher la résolution de la quadrature du cercle (circassien).
Géométrie, force centrifuge et gravitation Et, ça n’a peut être l’air de rien, mais un parquet doit être horizontal. Celui ou celle qui a déjà guinché sur les lattes en pente de certaines guinguettes ou autres chapiteaux montés de guingois, connaît le guet-apens frappant les couples qui finissent tous par jouer des coudes dans le même coin surpeuplé et pour les enchaînés du hanter dro qui ont du mal à remonter la pente sans se cramponner. Les musiciens de leur côté peuvent alors se sentir esseulés loin tout là-bas, sur leur scène...

The best of all ?

Et la meilleure des salles… c’est peut-être quand il n’y a pas de murs. Lorsque par une belle nuit d’été la danse est ouverte à la belle étoile sous des guirlandes lumineuses ou des lampions. La fraîcheur montante de la nuit, une légère brise qui avive les sens… Mais, règle d’or, il y faut tout de même un bon parquet !

 

Hervé Subiger (and Co…)